Les larmes de Näques

 

Part of a shorty story written using a set of chosen words for the group “l’ esprit de la lettre”

Partie d’une courte nouvelle écrite utilisant la série de mots imposées dans le cadre d’un jeu créé par le groupe “l’esprit de la lettre” et n’ayant pour la plupart aucun sens réel. Il s’agissait donc de broder dessus pour faire naître un sens

Mots à utiliser: longanimigité – verglané – infortupeine – pararence – barbison – parhison – farigosité – quintebole – chabichoux -pourprendre – étherlite – bouillon – symtessence – anodoxe – déguerpiture – ostrother – carméchou – allophile – paradance – luël – délivriter – paratonnance – usinée – innocement – podagrenée – jugemence – foirqueur – Turkheim – marqueuries -aventeure – s’effritance – Näques – pourprichou – Ombrugoselle – indifféchette

Les larmes de Näques

18 décembre 2010

Elle se glissa sans bruit hors de la pièce plongée désormais dans une noire Ombrugoselle. Elle ignorait la symtessence même de ce qu’elle était désormais devenue. Elle se souvenait seulement de la farigosité visqueuse des tentacules qui l’avaient enserrée et de ses électrolytes qui se baladaient comme des lumières étincelantes derrières ses paupières. Quand l’ostrother se fut diffusée totalement dans ses veines, elle avait entendu cette voix morne déclarer dans un crissement métallique « Anodoxe niveau 10 atteint. Le bouillon humain a été extrait et la droïde ne conserve plus que la pararence humaine d’auparavant ».

Quand les survivants étaient venus la délivriter, de son infortupeine, elle n’avait ressenti aucun transport de joie, juste comme un clic quelque part dans les tréfonds de son corps verglané, comme un bruit sourd venant de son âme. Les droïdes possédaient-ils des âmes ? Elle se tâta avec précaution en pensant à sa longanimigité pendant le questionnement mais ne ressentit rien et ne vit aucune des marqueries qu’elle s’attendait à voir sur son corps couvert il y avait à peine quelques minutes de protubérances tubulaires insérées au plus profond de sa chair. Elle repensa à la course folle suivie par l’arrestation et des longues heures passées dans le chabichoux avec les autres avanteures en attente de jugemence. Elle n’avait rien délivré comme nom mais elle avait entendu tant d’autres parler sur le champ de jugemence. Tous, l’un après l’autre avait clamé haut et fort les noms des aînés pour sauvegarder leur innocement.

Elle avait regardé leur s’effritance avec un mélange de pitié et de dégoût en pensant à quand les graines l’atteindraient et qu’elle serait ensemencée. Il n’y avait aucune fuite possible car elles pénétraient par les narines, les oreilles, les yeux et même parfois par les pores. Il était difficile de résister à l’ensemencement des graines de vérité mais elle avait été bien podagrenée par la barbison et ne se serait pas fait pourprendre. Goutte par goutte, elle avait distillé hors de ses membres le carméchou résultant du mélange de son sang et des graines mais cette résistance lui fut fatale. Personne n’avait jamais résisté au champ de jugemence et le résultat de sa lutte avait été recueilli dans une quintebole à son insu. Turkheim avait plongé un doigt dans le breuvage et goûté au liquide dense de son insubordination. Il sentit comme un coup fulgurant de paratonnance, le substrat intense de la révolte l’avait parcouru comme mille éclairs et il sentit sa puissance brute. Elle avait non seulement résisté au traitement mais l’avait même transformé en un mélange intoxicant de révolte qui pourrait lui être fatal. Il ne pouvait permettre que cela se sache et il décida qu’il ne restait plus que l’opération anodoxe pour maîtriser cette avanteure. Cette opération était normalement réservée aux avanteures condamnées pour parhison mais il jugea que la cour n’avait pas besoin de connaître les détails. Il déclarerait dans le rapport qu’elle ne pouvait se prévaloir de son innocement parce que son nom figurait parmi ceux ayant créé la révolte et donc coupable de haute  parhison. Devant la cour des surannés, elle eut beau invoquer son innocement mais le conseil des luëls fut formel et la sentence sans déguerpiture : transformation par anodoxe.

« Foirqueur, espèce de sale foirqueur », elle avait hurlé en direction de Turkheim qui la regardait narquois. Ce furent les dernières paroles qu’elle prononça en tant qu’aventeure avant que le couvercle ne se referme sur elle et que les tubes s’insinuent dans sa chair.

Elle se ressaisit et revint à l’instant présent. Les survivantes étaient rapides mais elle se surprit à les dépasser absolument pas affaiblie par sa longue inertie. Kayla la regarda les yeux plissés, elle n’avait jamais couru aussi vite auparavant et aurait dû être encore plus ralentie par la souffrance. Elle allait devoir lui faire subir l’épreuve d’humanigrité si elle voulait pouvoir compter sur elle dans la révolte. Näques qui n’avait rien ressenti du changement d’humeur de Kayla continua à courir à découvert. Dehors les serveurs étherlites diffusaient une lumière glauque et des lasers stroboscopiques s’alternaient entre les temps morts de musique. Un jeune groupe de Turkheimites s’amusaient à une paradance folle entre éclairs du stroboscope et temps de musique. Personne ne fit attention à elles et elles continuèrent leur course folle jusqu’à la navette qui les attendait hors de la station orbitale.

Une fois dedans, la navette décolla sans plus attendre et Kayla lança l’ordre muet de se saisir de Näques qui se laissa faire indifféchette. Suivit alors un questionnement mais pas identique à celui qu’elle avait eu à subir auprès des Turkheimites. Kayla s’insinua dans son esprit pour la questionner et n’avait pas besoin de l’ensemencer de graines qui n’auraient servi de toute façon à rien puisque Näques était immunisée à leur effet.  Näques la rassura qu’elle n’avait pas besoin de mentir, c’était son clan et elle répondit à toutes ses questions y compris quand elle lui demanda pour l’anodoxe. Kayla la regarda avec stupeur car elle ne s’attendait pas à un droïde de leur côté. Elle lui prit le bras avec douceur et s’exclama « Ils ont beaucoup amélioré leur technique. Tu es vraiment bien usinée et as gardé toute ta pararence humaine. Näques, ce nom qui te fut donné pour le soyeux de ta peau, tu le mérites encore même si ton intérieur est tout métallisé. C’est drôle comme ta voix n’a pas changé et n’a pris aucune inflexion métallique ». Les autres avanteures commencèrent à s’agiter à ses paroles prononcées à haute voix et non plus dans l’esprit de Näques.  L’une d’entre elles s’avança vociférant qu’il fallait s’en débarrasser au plus vite sans quoi elles seraient en danger. S’ensuit un dialogue rapide entre elle et Kayla et elle retourna dans les rangs, pourprichou mais sans plus proférer des menaces.

Kayla se retourna vers les autres avanteures et lança d’une voix forte « Je me porte garantette de Näques et déclare avoir parcouru son esprit. Elle n’est pas devenue allophile à la cause des Turkheimites et reste avanteure dans son âme. Elle a subi l’anodoxe mais son âme est restée intacte ». « Les droïdes n’ont pas d’âme !» lança une voix dans la foule et les protestations reprirent. Näques ressentit encore ce curieux clic et pensa à sa propre interrogation quelques minutes avant sa délivriture. Comment les convaincre ? Elles les regarda, ses sœurs devenues des étrangères et sentit encore ce déclic et une drôle de sensation au niveau de ses yeux. Les avanteures la regardaient partagées entre la pitié et la répulsion et portant la main à ses yeux, elle sentit des billes métalliques lui tomber sur les doigts. Elle pleurait des larmes de métal. Les droïdes avaient donc une âme, pensa-t-elle en pensant aux innombrables droïdes qu’elle avait dû détruire, ses sœurs transformées après leur anodoxe. Une impression de grande lassitude la submergea. La révolte, les avanteures, Kayla, plus rien ne lui semblait désormais important.

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